L’ hypnose : Que dit la neuroscience ?
La neuroscience s’intéresse à décrire et comprendre le fonctionnement du système nerveux central et périphérique humain . Ceci comprend le cerveau, la moelle épinière et tout le réseau nerveux et informationnel de notre corps.
La neuroscience s’est donc très vite interrogée sur la chimie neuronale, la phénoménologie des réflexes, les processus volontaires, le traitement de l’information consciente, inconsciente, préconsciente. Nombre de travaux ont permis d’avancer sur l’étude des ondes cérébrales, puis plus récemment, sur états modifiés de conscience (comprenant le coma) ou les états amplifiés de conscience telle que l’hypnose !
A ce jour, l’hypnose est considérée à la fois comme une pratique et comme une démarche relationnelle & psychique . On assiste à un regain d’intérêt pour le processus hypnotique. Sa phénoménologie intéresse les praticiens médicaux, les thérapeutes et les neuroscientifiques.
Nos zones hypnotiques
sont si nombreuses…
Découvrer l’hypnose en toute simplicité, lors d’une séance découverte….
Les études neuroscientifiques sur l’hypnose
Les premières études scientifiques à objectiver la spécificité de l’état de « trance » ont été réalisées dans les années 40, grâce à l’EEG ou électro-encéphalographie. Les travaux de Gordon en 1949 ont permis une première distinction d’importance : L’hypnose n’est pas le sommeil !
En effet, les sujets hypnotisés présentent sous EEG, des ondes à fréquences lentes dites « ALPHA », Ces dernières ne sont pas assimilables à la typologie des ondes observables dans les différentes phases du sommeil.
Dans les années 1980, avec l’arrivée de la TEP ou tomographie par émission de positrons, on décide d’observer le cerveau en activité, au travers du débit sanguin et de ses variations. Les tests de l’époque sont simples mais constituent une base de données solides pour étudier le fonctionnement cérébral, selon l’activité (chant, calcul…) et sous différents aspects.
Deux études notables ont été menées en 1999, par les équipes belges du CHU de Liège conduites par M-E Faymonville et les équipes canadiennes de Pierre Rainville à Montréal. Ces travaux ont été menés notamment avec l’EEG, EOG (electro-oculagraphie), EMG (électromyogramme) et IRMf (Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle)
Hypnose : absorption, automaticité, suggestibilité
Les équipes de ces deux professeurs ont orienté leurs travaux et observations sur :
• Absorption mentale : engagement des mécanismes attentionnels en hypnose
• Automaticité : sensation pour les sujets de perdre le contrôle de leurs actes moteurs lors de transe
• Suggestibilité : C’est en étudiant la suggestibilité des sujets, qu’il est apparu que les personnes hautement
hypnotisables décrivent une anatomie cérébrale mieux dotée, concernant la zone du CORPUS CALLOSUM (plus développé de +32% par rapport aux sujets difficilement hypnotisables).
Cette dernière zone aurait une implication importante dans la capacité attentionnelle et le transfert des informations dans les cortex préfrontaux.
Ces axes de travail sont concordants et complémentaires bien que les conditions diffèrent notamment dans les méthodes de suggestions verbales employées.
Cependant ces travaux, de part et d’autre, ont réussi à démontrer l’apport indéniable de l’hypnose pour la prise en charge médicale.
Travaux de Stuart DERBYSHIRE : hypnose et réalité
L’induction hypnotique permet de faire « glisser » un sujet d’un état de veille vers l’état modifié de conscience que représente l’hypnose.
Dans l’étude de DERBYSHIRE, en 2004, une douleur suggérée hypnotiquement (2) induit une activation de circuits cérébraux presque similaires à ceux d’une douleur provoquée réellement (1) ! Cette même étude souligne qu’une douleur simplement imaginée (3), en état de veille, n’active qu’une infime partie des circuits neurologiques impliqués par une douleur objectivée (1).
Modalités de l’expérience :
Est placée dans la paume de main des sujets une sonde thermique. Est indiqué aux sujets, le fait que toutes les 30 secondes, ils recevront un stimulus douloureux de chaleur ( 48,5°). Cependant dans la moitié des cas, le stimulus ne sera pas déclenché, la sonde restant froide.
1- Douleur déclenchée pour le test
2- Douleur induite par suggestions verbales hypnotiques
3- Douleur imaginée en veille ordinaire
Résultat de l’étude sous IRMf : A l’état de veille normale, la douleur imaginée ne s’associe qu’à une très minime activation du réseau neuronal impliqué dans la douleur du sujet.
En conclusion, l’expérience subjective du sujet (ressenti, expérience visuelle, auditive…) se distingue de la simple visualisation, présente lors d’une scène imaginée en état de veille normale. Les sensations et perceptions sont vécues comme vraies par le cerveau lui-même.
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ETAT HYPNOTIQUE & analgesie
Inhibition de réflexes grâce à l’état hypnotique
Autres travaux neuroscientifiques : Inhibition de réflexes au 1er relais de la moelle épinière.
La transe hypnotique autorise une modulation de l’activité du cortex cérébral et de la moelle épinière. L’hypnose peut réduire ou bloquer la transmissions des signaux douloureux, et ce, dès le premier relais de l’axe spinal.
Une étude expérimentale montre que la simple verbalisation de suggestions analgésiques inhibe le réflexe RIII, déclenché par des stimulations douloureuses ( Tracey & al. 2002 – Sandrini & al. 2000).
Ces travaux neuroscientifiques, cliniques, appuyés de la pratique médicale donnent force à l’utilité de l’hypnose médicale et thérapeutique. L’outil hypnotique invite de nombreux scientifiques à explorer les états de conscience, la perception des stimulus et transmission de l’information.
L’imagerie cérébrale fonctionnelle corrobore le postulat selon lequel les sujets hypnotisés, au délà des suggestions du thérapeute, vivent activement un état neurologique spécifique.
Après avoir été délaissé, au moins jusqu’en 2000, avec la découverte des gaz anesthésiques, l’hypnose semble avoir retrouvé plus que ses lettres de noblesse. Objectivée et crédibilisée par les découvertes de la neuroscience, l’hypnose réintègre l’univers médico-scientifique.
La Phénoménologie de la conscience en hypnose
Pour un traitement conscient de l’information, doivent se réunir :
- Le niveau de vigilance ad hoc
- L’activation ascendante des aires sensorielles primaire et secondaires
- L’activation des cortex associatifs (ralliements de neurones dotés d’axones plus longs, perpétuant un écho entre réseaux neuronaux distants
- Avec un signal faible, le traitement de l’information sera inconscient et éphémère (état subliminal)
- Avec un signal assez puissant, il y a un potentiel de propagation dans les différentes régions sensorimotrices ciblées.
Cependant une 2ème condition est nécessaire pour le traitement conscient de l’information : une attention orientée ou focalisation. L’information reste inaccessible à l’état préconscient, si l’attention n’est pas dirigée pour capter la donnée.
Si le processus attentionnel est dirigé vers la perception de l’objet informationnel alors s’interconnectera plusieurs aires associatives de manière riche et intense. L’information est alors disponible plus longtemps et permet de mobiliser un plus grand nombre de circuits cérébraux spécialisés. Le mécanisme attentionnel est donc « discriminant ».
L’induction hypnotique peut être proposée en orientant l’attention du sujet sur des phénomènes préconscients, subliminaux, qui seront de ce fait auto-amplifiés, vers une conscientisation exacerbée.
Un élargissement de la plage d’activation neuronale consciente mobilisera de façon inhabituelle (quelque peu énergivore) des ressources cérébrales. Une stimulation multifocale peut conduire à la dissociation, phénomène reconnu pour glisser vers la transe hypnotique.
La dissociation permet au sujet de désunifier le traitement des informations ainsi que délier des circuits habituellement solidaires.
Chaque réseau autonomisé dans l’expérience hypnotique peut venir expliquer l’automaticité (catalepsie, signaling ou lévitation d’un bras).
La perte de lien entre les choses, les sensations, les émotions, intéresse les pratiques analgésiques et les possibles restructurations psychiques. Il peut y avoir un ralentissement du rythme idéique, permettant de figer d’avantage une scène intérieure, se voulant éloignée des données sensorielles en présence.
Toute information dont la valeur est insuffisante n’intégrera pas le processus mnésique. Elle sera donc oubliée naturellement et sans effort.
L’état hypnotique : l’étudier pour « soigner »
L’hypnose n’est pas de la relaxation. Son efficacité a été objectivée par différentes études dont celles de l’American Health et de l’INSERM. Le neurobiologiste EDELMAN nous détaille son point de vue.
Hypnose n’est pas relaxation
L’activité EEG reconnait que l’hypnose est un état distinct des phases de sommeil, de relaxation ou de veille ordinaire.
Même si en effet, l’induction peut s’aider d’une phase de détente profonde qui peut se situer à l’orée des états hypnotiques observés. Ces différentes phases peuvent s’entremêler pendant un temps précaire.
Cependant la phase hypnotique a ses propres spécificités. L’EEG détecte quelques particularités de l’hypnose mais c’est surtout les IRMf (imageries fonctionnelles) qui révèlent des processus d’activation cérébrale distincts de la veille, du sommeil ou de la relaxation.
C’est donc bien la pratique d’une induction qui permet de passer de l’état de relaxation à une transe hypnotique.
La « transe » est issue du terme anglais « transe » qui signifie « état hypnotique » et n’a pas la connotation spirituelle qu’on lui connait en France. La transe est un état physique, physiologique particulier, scientifiquement reconnu et démystifié, depuis, par les avancées de la neuroscience en ce domaine.